Biométhane : les CPB et BPA, des contrats essentiels pour l'avenir de la filière
Les Certificats de Production Biométhane (CPB) et les Biogas Purchase Agreements (BPA) transforment le marché européen du biométhane. Grâce à ces nouveaux outils, producteurs et industriels s'adaptent à un marché plus compétitif, tout en stimulant les échanges transfrontaliers et en répondant à la demande croissante de gaz vert.
Le marché français et européen du biométhane sont en pleine mutation, portés par des contrats innovants comme les Certificats de Production de Biométhane (CPB) en France et les Biomethane Purchase Agreements (BPA). Ces mécanismes privés structurent les échanges de biométhane en complément des mécanismes historiques de soutien publique, offrant de nouvelles opportunités pour les producteurs et les grands consommateurs d'énergie.
Lola Ferrer, fondatrice de Nevenys et experte en trading de biométhane, nous éclaire sur ces dynamiques.
CPB et BPA : Qu'est-ce que c'est ?
Introduit le 24 août 2021 dans la loi Climat et Résilience, le mécanisme des Certificats de Production de Biogaz (CPB) a été précisé par décret le 6 juillet 2024. Les CPB permettent aux nouvelles installations mais également à des installations existantes de bénéficier d'un mode de financement par des fournisseurs soumis à l'obligation d'incorporation de « Certificats de Production de Biogaz. D'autres schémas d'obligation d'incorporation existent déjà dans d'autres pays européens notamment dans les secteurs de la mobilité, où le biométhane est considéré comme un biocarburant, et peut servir à couvrir l'obligation de mélange via l'usage de bioCNG ou le bioGNL.
Les BPA (Biomethane Purchase Agreements), inspirés des contrats de type Power Purchase Agreements (PPA) dans le secteur de l'électricité, sont des contrats privés qui garantissent aux industriels ou énergéticiens un approvisionnement en biométhane sur plusieurs années. Cela concerne en général de la production non subventionnée, même si certains peuvent inclure des volumes subventionnés. Plusieurs accords de ce type ont été annoncés dans la presse : Arkema/ Engie, St Gobain/Total énergies, Waga/Engie/Véolia, Basf/Engie, Rénéra/Méthagora…
Un marché européen encore fragmenté, mais en croissance
Le marché du biométhane en Europe reste inégalement réparti. L'Allemagne est de loin le plus grand producteur mondial et européen, avec une production huit fois supérieure à celle de la France, en grande partie destinée à la production d'électricité renouvelable. Dans des pays comme l'Italie, le biométhane est largement utilisé comme biocarburant, soutenu par des politiques incitatives.
En Scandinavie et en Suisse, où la décarbonation est une priorité nationale, la consommation dépasse la production locale. Ces régions importent déjà des volumes de biométhane, créant des opportunités pour les producteurs européens.
Les grands industriels, notamment dans les secteurs de la chimie commencent à faire appel au biométhane, car cela ne nécessite pas de modifier les installations de combustion.
Des mécanismes adaptés à la production non subventionnée
Dans un contexte où les États membres resserrent leurs budgets et où les subventions publiques diminuent, les CPB et BPA sont devenus des instruments clés pour les producteurs de biométhane. Les CPB offrent un schéma de relève pour les projets de production qui ne peuvent plus bénéficier des tarifs subventionnés. Les BPA répondent aux besoins des entreprises cherchant à sécuriser leur approvisionnement renouvelable sur le long terme.
« Les CPB et BPA offrent une visibilité de long terme aux producteurs de biométhane, et permettent de sécuriser leurs revenus sur la durée dans un marché de plus en plus concurrentiel. »
Lola FERRER
Un cadre réglementaire en évolution
Le développement du biométhane en Europe s'inscrit dans le plan « Repower EU », adopté en 2022 par la Commission Européenne. Ce plan vise à réduire la dépendance énergétique européenne, en réaction au conflit entre la Russie et l'Ukraine. Il fixe un objectif ambitieux : produire 35 milliards de mètres cubes (Gm³) de biométhane par an d'ici 2030. Aujourd'hui, l'Europe produit moins de 5 Gm³/an, ce qui montre bien l'ampleur des efforts à fournir pour atteindre ce nouveau cap.
Pour faciliter cet essor, la directive européenne RED III, adoptée en 2023, encourage la collaboration entre les pays en harmonisant les pratiques de production et d'échanges de biométhane. Cette directive rend possible des échanges transfrontaliers plus fluides.
En France, bien que la directive RED II soit toujours en application, le pays prévoit bientôt de transposer la RED III pour soutenir ces objectifs.
Vers une fluidité des échanges en Europe
Bien que l'interconnexion des registres nationaux soit encore un défi, des efforts sont en cours pour harmoniser ces systèmes et fluidifier les échanges à l'échelle européenne. Le projet « Union Data Base » devrait permettre à terme de répertorier l'ensemble des garanties d'origine relatives au biométhane.
Avec un marché en développement, ces outils contractuels offrent des perspectives solides aux producteurs et aux consommateurs industriels, contribuant activement à la transition énergétique européenne.
Nos articles sur le même thème
Certificats de Production de Biogaz : les nouveaux textes réglementaires, une étape décisive pour la filière biométhane
Le dernier décret, très attendu par la filière, a été publié au Journal Officiel ce 6 juillet 2024. Ce nouveau mécanisme de financement des unités de méthanisation est un outil indispensable au développement du biométhane.
Le guide ADEME – La méthanisation en 10 questions/réponses – fait peau neuve
Le nouveau guide ADEME sur la méthanisation : Fonctionnement, avantages et impacts environnementaux