Garanties d'origine : un outil de dialogue entre porteurs de projets et collectivités

National 30 JUIN 2025

Un cadre rénové depuis 2020 permet aux collectivités d'accéder aux garanties d'origine locales et de soutenir les projets de méthanisation.

Les garanties d'origine biométhane issues des sites de production ayant signés leur contrat d'achat après le 9 novembre 2020, sont intégrées à un système d'enchères nationales. Encore méconnues des porteurs de projets, ce nouveau mécanisme peut pourtant devenir un levier stratégique dans la relation avec les élus locaux. À condition d'en maîtriser les règles. 

Un changement de cadre à apprivoiser 

L'évolution du cadre réglementaire a profondément modifié la manière dont les producteurs de biométhane cèdent les garanties d'origine (GO). Depuis le 9 novembre 2020, les GO issues de contrats d'achat nouvellement signés sont directement cédées à l'État, qui les revend lors d'enchères trimestrielles sur la plateforme européenne EEX. Le mécanisme demande encore à être mieux compris par les porteurs de projets. Pourtant, il peut aussi ouvrir des opportunités : certaines collectivités peuvent accéder à ces garanties d'origine gratuitement, ce qui peut faciliter les échanges avec les élus locaux. 

Un mécanisme d'enchères structurant 

Le fonctionnement est le suivant : à chaque trimestre, les GO issues des sites et dont le contrat d'achat a été signé après le 9 novembre 2020 sont mises en vente sur EEX. Tout acteur peut participer, à condition de disposer d'un compte utilisateur sur le registre. 

Les enchères sont fermées, sans visibilité sur les offres concurrentes. À la clôture, les volumes sont attribués aux acheteurs les plus offrants. Le prix moyen est ensuite publié. En mai 2025, par exemple, 90 000 GO, issus de 46 sites de production ont été mises aux enchères.  

L'achat préférentiel pour les producteurs : une option ouverte mais encore peu mobilisée 

L'achat préférentiel permet au producteur de racheter prioritairement ses propres garanties d'origine avant qu'elles ne soient mises aux enchères. Cette possibilité implique toutefois quelques contraintes :   

  • un engagement minimal d'un an,  
  • un prix fixé à la moyenne des enchères augmentée de 30 %. 

 Le mécanisme, bien que théoriquement accessible, n'a pas encore été utilisé par un site.  

La préemption : un levier concret pour impliquer les collectivités 

Les collectivités locales — communes, intercommunalités et métropoles — disposent, sous conditions, d'un droit de préemption sur les garanties d'origine produites sur leur territoire. Ce droit de préemption s'exerce avant les enchères mais après l'achat préférentiel par les producteurs. Ainsi, si le producteur ne les rachète pas, la collectivité peut les préempter gratuitement, à hauteur de sa propre consommation. Pour les porteurs de projets, la dynamique d'implication des collectivités commence ici. Une partie de la production locale peut être fléchée vers les usages locaux. 

Pour connaître les dates des prochaines enchères et déposer une demande de préemption, les collectivités doivent se référer au calendrier publié par EEX, disponible sur le site officiel de la plateforme. Chaque session correspond à un trimestre de production, avec une date limite de dépôt de demande quelques semaines avant la tenue de l'enchère. 

Conditions d'accès à la préemption des Garanties d'Origine 

Pour qu'une collectivité puisse exercer un droit de préemption sur les Garanties d'Origine (GO) issues d'une unité de méthanisation, les conditions suivantes doivent être réunies : 

• L'unité de production doit avoir signé son contrat d'achat après le 9 novembre 2020 et être située sur le territoire de la collectivité 
Pour vérifier l'éligibilité, l'EEX publie trimestriellement la liste des sites concernés. Cette liste est consultable en ligne sur le site de l'EEX (rubrique « Biogaz France – Garanties d'Origine »). À ce jour, moins de 50 unités sont recensées, mais ce nombre est en progression ; 

• La collectivité doit ouvrir un compte sur la plateforme EEX, condition préalable à toute participation aux enchères de GO. 
Le coût annuel d'inscription est de 500 euros. La procédure détaillée d'ouverture de compte est disponible sur le site de l'EEX ; 

• Une demande de préemption doit être déposée chaque trimestre, dans la limite des consommations propres de la collectivité. 

La préemption est strictement réservée aux communes, EPCI et métropoles. Les départements et régions ne sont pas éligibles.  

Lorsque plusieurs entités (commune, EPCI, métropole) demandent à préempter les GO d'un même site, la répartition est effectuée au prorata de leur besoin. Cette règle garantit un partage équitable, proportionné à la consommation énergétique effective de chaque acteur public. 

Il faut que la collectivité ouvre un compte sur EEX (500 € HT/an) et qu'elle assume des frais techniques (3 centimes par GO). Par exemple, une commune souhaitant préempter 400 MWh par an pour ses équipements publics déboursera ainsi environ 512 € par an (500€ + 3ct*400) pour activer ce droit. Du côté de la collectivité, la démarche nécessite toutefois un minimum de temps de traitement administratif pour déclarer les consommations et suivre les échéances trimestrielles fixées par EEX. 

Une fois ces conditions réunies, la collectivité peut obtenir un certificat d'utilisation . Ce certificat matérialise l'usage d'une énergie locale, renouvelable, produite et injectée sur le territoire. 

Un levier d'acceptabilité pour les porteurs de projet

Ce mécanisme présente un intérêt particulier pour les porteurs de projets. Dans les phases de concertation ou de débat public, la possibilité pour la collectivité de préempter les GO du futur méthaniseur peut permettre de renforcer l'ancrage territorial du projet. Il ne s'agit pas d'une obligation réglementaire ni d'un dispositif systématique. Elle constitue une option concrète à proposer, notamment lorsque le site se situe sur une commune ou dans une intercommunalité attentive aux enjeux énergétiques. 

La collectivité bénéficie d'appuis possibles pour la mise en œuvre de cette démarche. Un syndicat d'énergie peut être mandaté pour effectuer les démarches administratives, sous réserve que le compte soit bien ouvert au nom de la collectivité. Dans ce cas, la visibilité offerte au projet est double : d'un côté, une valorisation territoriale via les certificats ; de l'autre, un soutien politique facilité par un mécanisme éprouvé. 

Une opportunité à ne pas sous-estimer 

Carte des sites de production ayant participés aux enchères de mai 2025

Aujourd'hui, le système des garanties d'origine reste largement dominé par les acteurs du marché. Les dispositifs complémentaires que sont l'achat préférentiel et la préemption offrent des marges de manœuvre intéressantes lorsqu'ils sont mobilisés. Si l'achat par les producteurs semble présenter aujourd'hui un intérêt limité, la préemption offre un levier territorial clair, encore peu mobilisé. 

Pour les porteurs de projets, c'est une carte à jouer dans la relation avec les élus : en intégrant cette possibilité dès les premières réunions de présentation, le projet de méthanisation gagne en lisibilité, en ancrage local et, potentiellement, en acceptabilité. 

Les garanties d'origine présentent un intérêt concret pour les collectivités, car elles permettent de valoriser localement la production de biométhane. En préemptant ces certificats, une commune ou une intercommunalité peut démontrer son engagement en faveur des énergies renouvelables et renforcer la cohérence entre production et consommation sur son territoire. C'est aussi un moyen de communiquer auprès des habitants sur l'origine verte de l'énergie utilisée dans les équipements publics, tout en contribuant à l'acceptabilité des projets de méthanisation. 

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