Collecte des biodéchets : solutions, impacts et méthodes

A quelques mois de la mise en application obligatoire pour tous du tri à la source des biodéchets, seulement 6 % de la population est couverte par une solution de collecte séparée selon l'ADEME. Les collectivités, toutes tailles confondues, doivent s'organiser et réfléchir aux meilleures solutions pour être conformes à l'obligation réglementaire de la loi AGEC de février 2020 applicable au 1^er janvier 2024.      

Quelles sont les solutions et pour quels impacts ?   

L'unité de recherche OPAALE d'INRAE, à Rennes, s'est penchée sur la question en menant une expérimentation sur le territoire de la communauté de commune « Cœur de Sologne », majoritairement rurale.  L'expérimentation a été menée sur la commune de Lamotte Beuvron, comptant 5 000 habitants et principalement dotée d'habitations pavillonnaires. Elle s'est intéressée plus précisément aux performances d'une collecte séparée des biodéchets en point d'apport volontaire sur deux types de producteur : les ménages et 4 restaurants collectifs : un collège, un EPAHD, une école primaire et un restaurant d'entreprise. 

1- La méthode  

Quatre bornes de type GAIABOX de l'entreprise AXIBIO ont été installées sur les zones de collecte expérimentales.  

Sur plus d'un an, la performance du tri de la collecte et ses impacts ont été évalués par un suivi en 3 étapes de caractérisation du gisement :  

• Une caractérisation initiale sur les ordures ménagères résiduelles (OMR) avant mise en place du tri des biodéchets ;  
• Une caractérisation trimestrielle sur les biodéchets collectés 

• Une caractérisation finale sur les OMR après un an de mise en place 

Les résultats ainsi obtenus ont permis de réaliser une meilleure photographie de la qualité de la collecte, de l'impact du point d'apport volontaire sur son environnement (émissions de gaz à effet de serre, nuisances olfactives) et du comportement du flux de biodéchets dans les conditions de stockage d'un point d'apport volontaire à fréquence de collecte définie.  

L'ensemble des flux collectés ont ensuite été valorisés sur l'unité de méthanisation, Sologne Agri Méthanisation, située sur la commune de Lamotte Beuvron. Une unité de méthanisation territoriale aux côtés de 10 agriculteurs, d'une capacité de traitement de 2 8000 tonnes/an pour une capacité de production de 17 GWh/an de biométhane. 

2- Les enseignements à retenir  

• Il y a encore trop de gaspillage alimentaire 

L'expérimentation montre que pour certains apporteurs de biodéchets, la quantité de biodéchets pouvant être évitée peut représenter jusqu'à 90 % du flux collecté.  

• La qualité du tri est très bonne mais la mobilisation reste à parfaire  
  • Le taux de collecte moyen des biodéchets établi sur cette expérimentation est de 40 kg/hab/an, ce qui est équivalent à la moyenne constatée par l'ADEME lors de sa dernière étude sur les données de collectivités ayant mis en place la collecte séparée.  
  • Les erreurs de tri constatées apportant des déchets non biodégradables dans les biodéchets n'excèdent pas 1,2 % du flux.  
  • L'engagement dans le temps des apporteurs de biodéchets à un tri de qualité reste à entretenir au-delà de la solution technique retenue. Une communication engagée et adaptée aux objectifs de performance visés est à mettre en œuvre. Des solutions existent, certaines disponibles dans la revue des solution pour décliner l'obligation du tri à la source des biodéchets, et des collectivités mènent déjà des expérimentations sur cet enjeu. Pour en savoir plus découvrez les lauréats de l'appel à projets pour la valorisation des biodéchets.  

On notera que cette expérimentation confirme une réduction de la quantité d'ordures ménagères résiduelles (OMR) d'environ 30 %. Une marge de progression persiste encore avec un peu plus de 25 % du gisement initial de biodéchets qui perdure dans les poubelles grises.  

Par ailleurs, une maitrise des coûts de gestion de la collecte des biodéchets est possible. Le dernier rapport de la Confédération des Métiers de l'Environnement le démontre en étudiant plusieurs scénarios. Accédez au rapport complet et la synthèse. 

Voici quelques exemples chiffrés sur les collectivités ayant mis en œuvre la collecte séparée et selon la typologie mixte urbain-rural à rural :  

• Lorient agglomération : 37 kg/hab./an*  

• Syndicat Mixte Thann Cernay : 57 kg/hab./an* 
• Syndicat Centre Hérault : 37 kg/hab./an* 
• SMICTOM des Pays Ile et Vilaine : 29 kg/hab./an*  

*source : ESPELIA et performances calculées sur la base de la population totale) 

• Un faible impact environnemental de la collecte en point d'apport volontaire  

Le stockage dans les points d'apport volontaire de biodéchets engendre peu d'émissions de gaz à effet de serre et pas de diminution du potentiel méthanogène.  

• Un flux de biodéchets qui reste par nature vecteur de microorganismes impliquant des modalités de gestion de la collecte adaptée.  

L'expérimentation ne fait que confirmer un constat connu des gestionnaires de déchets et des collectivités, qui implique, à ce titre, le respect d'une réglementation sanitaire adaptée.  

Le dernier rapport de 2022 de l'INRS et de l'assurance maladie relatif aux risques et aux modalités de prévention concernant la filière des biodéchets alimentaires vous permettra d'en apprendre encore davantage sur ce sujet spécifique. 

3- Les perspectives 

A l'issu des résultats de cette expérimentation, le territoire de Lamotte Beuvron compte déployer de nouveaux points d'apport en volontaire sur l'année 2023 pour généralisation à l'ensemble de ces habitants aux côtés de la CC Cœur de Sologne.  

Avec ses 10 874 habitants et considérant le ratio de 40 kg/hab/an, la CC Cœur de Sologne pourrait ainsi valoriser en méthanisation un peu plus de 400 tonnes/an de biodéchets (hors acteurs économiques de son territoires) pour 350 tonnes/an d'engrais naturel issu des digestats et l'équivalent de la consommation de 2 bus ou bennes à ordures ménagères roulant au bioGNV ou de quoi chauffer au gaz vert un lotissement d'un peu plus d'une centaine de logements neufs.  

Avec une capacité de production de biométhane de près de 470 MWh/an* c'est aussi l'équivalent des besoins de gaz de 10 cantines scolaires **. 

Enfin, c'est aussi une économie d'émission de GES de près de 90TCO₂/an.  

* sur hypothèse de 52MWh/an pour une cantine scolaire de 600 repas/jours 

** en considérant 100 Nm3/h de biométhane/t de biodéchets et un PCS de 10,8 kWhPCS 

*** en considérant une substitution d'un usage Gaz naturel fossile par du biométhane (FE = 23 g CO2e/kWhPCS versus 230 g CO2e/kWhPCS).

Pour aller plus loin 

L'importance et les enjeux du tri des biodéchets n'est plus à prouver. Il est indéniable que ces collectes peuvent représenter de nombreux atouts pour les territoires et venir servir les intérêts de la méthanisation. Pour en savoir plus sur le sujet, découvrez le guide du tri à la source des biodéchets jusqu'à leur méthanisation.

Des vidéos témoignages vous présentent également comment se passe la collecte sur les territoires et comment les communes se sont appropriées le sujet tout comme d'autres acteurs économiques jusqu'à la méthanisation des biodéchets.